Parfums anciens
À François Coppée
I
Ô senteur suave et modeste
Qu’épanchait le front maternel,
Et dont le souvenir nous reste
Comme un lointain parfum d’autel,
Pure émanation divine
Qui mêlais en moi ta douceur
À la petite senteur fine
Des longues tresses d’une soeur,
Chère odeur, tu t’en es allée
Où sont les parfums de jadis,
Où remonte l’âme exalée
Des violettes et des lis.
II
Ô fraîche senteur de la vie
Qu’au temps des premières amours
Un baiser candide a ravie
Au plus délicat des velours,
Loin des lèvres décolorées
Tu t’es enfuie aussi là-bas,
Jusqu’où planent, évaporées,
Les jeunesses des vieux lilas,
Et le coeur, cloué dans l’abîme,
Ne peut suivre, à ta trace uni,
Le voyage épars et sublime
Que tu poursuis dans l’infini.
III
Mais ô toi, l’homicide arôme
Dont en pleurant nous nous grisons,
Où notre coeur cherchait un baume
Et n’aspira que des poisons,
Ah ! Toi seule, odeur trop aimée
Des cheveux trop noirs et trop lourds,
Tu nous laisses, courte fumée,
Des vestiges brûlant toujours.
Dans les replis où tu te glisses
Tu déposes un marc fatal,
Comme l’âcre odeur des épices
S’incruste aux coins d’un vieux cristal.
IV
En tel, dans une eau fraîche et claire,
Le flacon, vainement plongé,
Garde l’âcreté séculaire
De l’essence qui l’a rongé,
Tel, dans la tendresse embaumante
Que verse au coeur, pour l’assainir,
Une fidèle et chaste amante,
Sévit encor ton souvenir.
Ô parfum modeste et suave,
Épanché du front maternel,
Qui lave ce que rien ne lave,
Où donc es-tu, parfum d’autel ?
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