Éternels Éclairs


Le temps perdu

Si peu d’oeuvres pour tant de fatigue et d’ennui !
De stériles soucis notre journée est pleine :
Leur meute sans pitié nous chasse à perdre haleine,
Nous pousse, nous dévore, et l’heure utile a fui ...

" Demain ! J’irai demain voir ce pauvre chez lui,
" Demain je reprendrai ce livre ouvert à peine,
" Demain je te dirai, mon âme, où je te mène,
" Demain je serai juste et fort ... pas aujourd’hui. "

Aujourd’hui, que de soins, de pas et de visites !
Oh ! L’implacable essaim des devoirs parasites
Qui pullulent autour de nos tasses de thé !

Ainsi chôment le coeur, la pensée et le livre,
Et, pendant qu’on se tue à différer de vivre,
Le vrai devoir dans l’ombre attend la volonté.

— Sully Prudhomme,
Les vaines tendresses

Du même auteur

Les Poèmes de Sully Prudhomme de A à Z

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