Le Lever du soleil
À Henri Schneider.
Le grand soleil, plongé dans un royal ennui,
Brûle au désert des cieux. Sous les traits qu’en silence
Il disperse et rappelle incessamment à lui,
Le choeur grave et lointain des sphères se balance.
Suspendu dans l’abîme il n’est ni haut ni bas ;
Il ne prend d’aucun feu le feu qu’il communique ;
Son regard ne s’élève et ne s’abaisse pas ;
Mais l’univers se dore à sa jeunesse antique.
Flamboyant, invisible à force de splendeur,
Il est père des blés, qui sont pères des races ;
Mais il ne peuple point son immense rondeur
D’un troupeau de mortels turbulents et voraces.
Parmi les globes noirs qu’il empourpre et conduit
Aux blêmes profondeurs que l’air léger fait bleues,
La terre lui soumet la courbe qu’elle suit,
Et cherche sa caresse à d’innombrables lieues.
Sur son axe qui vibre et tourne, elle offre au jour
Son épaisseur énorme et sa face vivante,
Et les champs et les mers y viennent tour à tour
Se teindre d’une aurore éternelle et mouvante.
Mais les hommes épars n’ont que des pas bornés,
Avec le sol natal ils émergent ou plongent :
Quand les uns du sommeil sortent illuminés,
Les autres dans la nuit s’enfoncent et s’allongent.
Ah ! les fils de l’Hellade, avec des yeux nouveaux
Admirant cette gloire à l’Orient éclose,
Criaient : Salut au dieu dont les quatre chevaux
Frappent d’un pied d’argent le ciel solide et rose !
Nous autres nous crions : Salut à l’Infini !
Au grand Tout, à la fois idole, temple et prêtre,
Qui tient fatalement l’homme à la terre uni,
Et la terre au soleil, et chaque être à chaque être !
Il est tombé pour nous, le rideau merveilleux
Où du vrai monde erraient les fausses apparences ;
La science a vaincu l’imposture des yeux,
L’homme a répudié les vaines espérances ;
Le ciel a fait l’aveu de son mensonge ancien,
Et, depuis qu’on a mis ses piliers à l’épreuve,
Il apparaît plus stable, affranchi de soutien,
Et l’univers entier vêt une beauté neuve.
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