Éternels Éclairs

Poèmes de Louis Ruiz

Louis Ruiz

Attention des droits d'auteurs, que nous ne possèdons pas, protègent la majorité des oeuvres ici présentes.

Césure

Apprends à graver le poème Pour que rien ne s’efface ou disparaisse Sans te préoccuper de cette folie Qui te fait choisir les mots Et qui te pousse à rêver les yeux ouverts Ne te crois pas obligé de tordre le cou à la syntaxe Pour faire plaisir à ta poésie Ou de te tailler les veines Si parfois ta poésie est triste C’est le prix à payer Et même si ton passé de lumière Te taraude la mémoire Ne compte pas sur l’oubli Heureusement pour toi La Poésie ne manque jamais d’espace Pour voyager dans le bruit du monde

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Éloge

Jour de pluie Jour de gris Mais dans mon cœur Que du bonheur Dans ma tête plein d’envies Dans mes yeux plein de vie Des rêves de soleil Et des nuits sans sommeil Mes mots qui se dérobent Comme mes mains sur ta robe Et pour tout souvenir Cet insensé désir

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Encre de nuit

Le mot est plus que signe Il est parfois nomade Hésitant sur sa destination Ou changeant de décor Ou maudissant son sort Nous voilà maintenant ni fous ni saints Mais amoureux perpétuels de cette beauté qui inspire Et dans l’attente du fameux chant profond Perdu tout au fond de notre mémoire Le souvenir incandescent des jours anciens Remonte inexorablement comme au commencement Fragile comme une aube nouvelle Le mot est en équilibre fragile Entre audace et humilité Il ne nous appartient plus Mais brûle encore comme un feu mal éteint Combustion lente et sans fin

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Haïkus pour rien

L’exil toujours là Même la lumière Ne peut l’effacer Tes songes veillent sur toi Tu sais pourquoi Nuit de pleine lune Entre douceur et oubli Ciel étoilé Paroles lumineuses Visible ou invisible Faillible ou infaillible Le mot est de trop Souvenir du pays perdu Mémoire des couleurs Qui défaille

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Hors-texte

Tu cherches le soleil dans les mots Et ton horizon s’ouvre à nouveau De sable et de lumière crue Comme les fruits de ton enfance Rouge éclaté dans cet éternel été Tu te dis que tu n’as plus la force D’affronter cette clarté Qui te menait jusqu’à l’ivresse Le temps ne s’arrête pas là Regarde maintenant ce ciel d’azur Qui se propose d’héberger ta mémoire Et de te rendre la fierté d’être un homme

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

La part des choses

J’ai le bonheur facile Et la nostalgie tenace J’ai usé mes semelles Par monts et par vaux D’un vent à l’autre Pour moi le temps n’a pas de rides Il s’écoule tout simplement Alors que faire de ces mots qui sentent la poussière ? Je préfère ces sourires qui sont des promesses Ou ce chant sans fin des oiseaux Pour me débarrasser de tout bagage inutile Dès les premiers relents de nostalgie Je me souviens que la vie est un songe Et le silence une mort vivante

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Métaphore

Il aimait à plisser des yeux Et jouir entièrement de l’instant Souvenirs de ces filles aux bras nus Sentant bon la vanille Il s’interdisait les rêves Et préférait les nocturnes visions Il aimait à collectionner les rires De ceux qui ne faisaient que passer Il disait souvent que la vie est désordre Que seul le silence peut surmonter Il refusait toujours d’aller plus avant Sur les chemins bourbeux de la mémoire Il ne voulait pas que sa vie soit reliques Ou soupirs ou mort lente Il savait que la lumière ne peut exister sans l’obscurité Et que la beauté est une des premières vérités de ce monde

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Pièce rapportée

Voulez-vous me prêter votre âme ? J’ai laissé la mienne s’élever le plus haut possible Sans prendre garde qu’elle ne m’échappe Comme une folle promesse dépassant toutes les attentes Ou comme un amour monstre à l’allure difforme J’ai perdu bêtement tous les repères de mon âme Alors que faire maintenant de cette infirmité ? Que faire de cette mémoire rebelle Qui remue en tous sens ? Il n’y plus d’écho à ma voix Il ne me reste que les mots Mais peut-on briser les mots Comme on brise le silence ?

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Se murio el rey

Les Mots sont tristes Ils ont perdu leur Roi Ce Roi cherchait les Mots Comme d’autres font la chasse aux papillons Synonymes Antonymes Homonymes Paronymes Il connaissait tous leurs secrets Il les flairait avec tant d’amour et de volupté Avant de les croquer Les yeux plissés de malice Grand blagueur il a toujours préféré les bibliothèques aux panthéons Pour lui les mots n’avaient ni patrie ni frontières Il les respectait pour mieux les magnifier Et avec lui chaque mot avait son histoire Le voyage à travers les mots fut sa grande aventure Mais la mort a eu son dernier mot...

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Songe ordinaire

Jusqu’à quand continueras-tu à tourner les pages de ton cahier d’exil ? Ce passé visité et revisité serait-il ton maître du temps ? Que dans ton sommeil une cascade de songes t’apporte la force et la lumière d’un soleil nouveau ! Apprends à t’enivrer du simple parfum du bonheur en fixant ces étoiles qui te restent fidèles Et reste à l’écart de ces bouches fétides qui n’exhalent que la haine et encrassent les cerveaux Ne tourne jamais le dos à la beauté mais pille sans hésiter le butin de ta vie Même si les mots te conduisent parfois vers des chemins vides de sens Ne cherche pas à résister à l’extase d’exister pour déguster jusqu’au vertige l’instant où tes mains vont toucher le ciel

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Ton ciel

Tu dessines l’éphémère Comme ce ciel encombré de nuages Qui disparaissent au gré du vent Mais qu’attends-tu du ciel Sinon cet espace et ce vide Où vient s’éprouver ta mémoire Tu dis que le ciel jamais ne vieillit Et qu’il n’est jamais illusion C’est qu’il contient tous tes désirs Quand d’autres s’épuisent à le regarder Et que plus rien ne les étonne

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants

Une vie de Poème

La force du Poème ? Une folle suite de mots et d’images Comme ces fleurs qui attendent d’éclore Voyage dans le bruit du monde Les mots peuvent tout dire Surtout quand ils dépassent la pensée Et prennent la force de sentiments à l’état pur C’est alors que le verbe devient roi Côté silence et côté bruit Comme un verre qui se brise Pour conjurer l’oubli Dans le secret de nos nuits Le Poème le voilà toujours prêt à tout partager Intuition et émotion sans hésitation Jusqu’à l’émerveillement Comme s’il faisait l’amour à la vie Le Poème ne respecte qu’un territoire Celui des mots Des mots devenus parfois aphones à force de crier

— Louis Ruiz
Dialogue avec les vivants
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