Éternels Éclairs

Chanson pour les enfants l'hiver

Dans la nuit de l'hiver Galope un grand homme blanc. C'est un bonhomme de neige Avec une pipe en bois, Un grand bonhomme de neige Poursuivi par le froid. Il arrive au village. Voyant de la lumière Le voilà rassuré. Dans une petite maison Il entre sans frapper, Et pour se réchauffer, S'assoit sur le poêle rouge, Et d'un coup disparaît Ne laissant que sa pipe Au milieu d'une flaque d'eau, Ne laissant que sa pipe Et puis son vieux chapeau.

— Jacques Prévert (1900-1977)
Histoires

Dans Paris

Dans Paris il y a une rue ; Dans cette rue il y a une maison ; Dans cette maison il y a un escalier ; Dans cet escalier il y a une chambre ; Dans cette chambre il y a une table ; Sur cette table il y a un tapis ; Sur ce tapis il y a une cage ; Dans cette cage il y a un nid ; Dans ce nid il y a un œuf, Dans cet œuf il y a un oiseau. L'oiseau renversa l'œuf ; L'œuf renversa le nid ; Le nid renversa la cage ; La cage renversa le tapis ; Le tapis renversa la table ; La table renversa la chambre ; La chambre renversa l'escalier ; L'escalier renversa la maison ; la maison renversa la rue ; la rue renversa la ville de Paris.

— Paul Éluard (1895-1952)
Dans Paris il y a ...

Demain, dès l'aube

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne, Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends. J'irai par la forêt, j'irai par la montagne. Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps. Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées, Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit, Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées, Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit. Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe, Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur, Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

— Victor Hugo (1802-1885)
Les contemplations

La Cigale et la Fourmi

La Cigale, ayant chanté Tout l'été, Se trouva fort dépourvue Quand la bise fut venue : Pas un seul petit morceau De mouche ou de vermisseau. Elle alla crier famine Chez la Fourmi sa voisine, La priant de lui prêter Quelque grain pour subsister Jusqu'à la saison nouvelle. « Je vous paierai, lui dit-elle, Avant l'Oût, foi d'animal, Intérêt et principal. » La Fourmi n'est pas prêteuse : C'est là son moindre défaut. Que faisiez-vous au temps chaud ? Dit-elle à cette emprunteuse. - Nuit et jour à tout venant Je chantais, ne vous déplaise. - Vous chantiez ? j'en suis fort aise. Eh bien ! dansez maintenant.

— Jean de la Fontaine (1621-1695)
Les Fables I

Le chat et le soleil

Le chat ouvrit les yeux, Le soleil y entra. Le chat ferma les yeux, Le soleil y resta. Voilà pourquoi, le soir, Quand le chat se réveille, J’aperçois dans le noir Deux morceaux de soleil.

— Maurice Carême (1899-1978)
L'arlequin

Le ciel nous raconte des histoires

Le vent toute la nuit a fait des nœuds avec tes rêves quand l’aube vient tu ne sais plus si la lumière te nourrit ou te mange de toute façon le jour n’existe pas c’est un mensonge pour effrayer les chauves-souris

— Thomas Vinau (né en 1978)
C’est un beau jour pour ne pas mourir

Le Pont Mirabeau

Sous le pont Mirabeau coule la Seine Et nos amours Faut-il qu'il m'en souvienne La joie venait toujours après la peine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Les mains dans les mains restons face à face Tandis que sous Le pont de nos bras passe Des éternels regards l'onde si lasse Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure L'amour s'en va comme cette eau courante L'amour s'en va Comme la vie est lente Et comme l'Espérance est violente Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Passent les jours et passent les semaines Ni temps passé Ni les amours reviennent Sous le pont Mirabeau coule la Seine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure

— Guillaume Apollinaire (1880-1918)
Alcools

Plénitude

Faire le vide en soi - Puis laisser le bien-être Envahir notre esprit. Plus d’envie d’ailleurs, Plus de passé ou futur, - Ici et maintenant ! Profiter de l’instant Pendant des heures Le temps du bonheur.

— Stéphen Moysan (1979-?)
J'écris mes silences

Soleils couchants

Une aube affaiblie Verse par les champs La mélancolie Des soleils couchants. La mélancolie Berce de doux chants Mon cœur qui s’oublie Aux soleils couchants. Et d’étranges rêves, Comme des soleils Couchants sur les grèves, Fantômes vermeils, Défilent sans trêves, Défilent, pareils À des grands soleils Couchants sur les grèves.

— Paul Verlaine (1844-1896)
Poèmes saturniens
}