Éternels Éclairs

Florilège de Poèmes
d'Andrée Chedid (1920-2011)



Par Stéphen Moysan

Attention des droits d'auteurs, que nous ne possèdons pas, protègent la majorité des oeuvres ici présentes.

A quatre temps

Matin Deviens matin Sois aube sois phénix Sème clair Dans les silos de l'ombre Midi Au faite du jour Hisse nos rêves A ton mât Soir Dissipe le gribouillis des heures Apaise le jour Que ton ventre subtil Se teinte de crépuscules Nuit Déverse tes encres Tes baumes Et tes lueurs Sur l'âme Indéchiffrable.

— Andrée Chedid (1920-2011)
Recueil non mentionné

De cet amour ardent je reste émerveillée

Je reste émerveillée Du clapotis de l’eau Des oiseaux gazouilleurs Ces bonheurs de la terre Je reste émerveillée D’un amour Invincible Toujours présent * Je reste émerveillée De cet amour Ardent Qui ne craint Ni le torrent du temps Ni l’hécatombe Des jours accumulés * Dans mon miroir Défraîchi Je me souris encore Je reste émerveillée Rien n’y fait L’amour s’est implanté Une fois Pour toutes. De cet amour ardent je reste émerveillée.

— Andrée Chedid (1920-2011)
Offert au Printemps des poètes 2007

L’espérance

J’ai ancré l’espérance Aux racines de la vie Face aux ténèbres J’ai dressé des clartés Planté des flambeaux A la lisière des nuits Des clartés qui persistent Des flambeaux qui se glissent Entre ombres et barbaries Des clartés qui renaissent Des flambeaux qui se dressent Sans jamais dépérir J’enracine l’espérance Dans le terreau du cœur J’adopte toute l’espérance En son esprit frondeur.

— Andrée Chedid (1920-2011)
Une salve d’avenir. L’espoir

La vie voyage

Aucune marche Aucune navigation N'égalent celles de la vie S'actionnant dans tes vaisseaux Se centrant dans l'îlot du cœur Se déplaçant d'âge en âge Aucune exploration Aucune géologie Ne se comparent aux circuits du sang Aux alluvions du corps Aux éruptions de l'âme Aucune ascension Aucun sommet Ne dominent l'instant Où t'octroyant forme La vie te prêta vie Les versants du monde Et les ressources du jour Aucun pays Aucun périple Ne rivalisent avec ce bref parcours Voyage très singulier De la vie Devenue Toi.

— Andrée Chedid (1920-2011)
Épreuves du vivant

Le rire

Le rire Pour rire Quitta les hommes Ce fut navrant Fallait voir comme Mais le rire Bonhomme Regagna son home Riant riant De voir comment Un homme sans rire N'est plus un homme

— Andrée Chedid (1920-2011)
Fêtes et lubies

Le secret

Qui étais-je avant Que serais après Ce bref parcours de vie Encerclé de mystère ? J'alerte Les credo de l'âme Je m'attache Aux menées de l'esprit Je braconne Dans les gisements du coeur Je furète Parmi les trames du savoir J'avance A l'insu des mots Je malmène Les dieux et les lois Impénétrables Demeure Le secret.

— Andrée Chedid (1920-2011)
Rythmes

Les saisons du sang

J'ai des saisons dans le sang J'ai le battement des mers J'ai le tassement des montagnes J'ai les tensions de l'orage La rémission des vallées J'ai des saisons dans le sang J'ai des algues qui me retiennent J'ai des hélices pour l'éveil J'ai des noyades J'ai des leviers J'ai des entraves J'ai délivrance J'ai des combats J'ai fleur et paix.

— Andrée Chedid (1920-2011)
Fraternité de la parole

Par les jardins de la terre

Par les jardins de la terre, Par les fontaines du seul amour, Par le blé et le liseron, Par l'élan et le roitelet, Par ma jeunesse tant promise, Par l'ami retrouvé, Par tous les mots que je veux dire, Par les mortels que j'aimerai: Que je vive, ah! que je vive Encore un espace de ce temps De ce temps qui nous est compté.

— Andrée Chedid (1920-2011)
Terre regardée

Pavane de la virgule

« Quant à moi », dit la virgule, J'articule et je module ; Minuscule, mais je régule Les mots qui s'emportaient ! J'ai la forme d'une Péninsule ; A mon signe la phrase bascule. Avec grâce je granule Le moindre petit opuscule. Quant au point ! Cette tête de mule Qui se prétend mon cousin ! Voyez comme il se coagule, On dirait une pustule, Au mieux : un grain de sarrasin.

— Andrée Chedid (1920-2011)
Fêtes et Lubies

Perte du chant

Quand meurt le Chant La terre suffoque Les paupières s'abattent Sur le regard rompu Quand meurt le Chant Les chemins errent Les mots s'échinent Sur la page sans issue Quand meurt le Chant Demain n'est plus.

— Andrée Chedid (1920-2011)
Recueil non mentionné
}