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Biographie de Andy Warhol (1928-1987)

Andy Warhol
Andy Warhol
Les Tableaux

Andy Warhol : De son vivant, il était déjà une légende via son oeuvre, son extravagance, les provocations et les scandales qu'il suscita, ses 200 perruques et sa mesquinerie sans oublier ses dizaines de Rolex. Ne cachant pas son homosexualité, soupçonné d'être un consommateur de drogues, Warhol défraya souvent la chronique. Adolescent, il collectionnait les autographes et photos de stars lesquelles devinrent plus tard l'objet de sa passion créatrice. Il les retravailla, les retrama, les charcuta et un beau jour, ils finirent par devenir des oeuvres d'art qui dépassèrent en galerie et en vente les 100 000 dollars pièce. Warhol découvrit d'abord la publicité en faisant ses études au Carnegie Institute of Technology à Pittsburgh. Devenu l'ami de Philip Pearlstein, il s'intéressa à la politique, aux transformations de la culture et de la civilisation américaine des années 40. D'origine tchèque, ce fils d'immigrés modestes chercha rapidement à échapper à sa condition.

Ce fut en 1949, qu'il commença sa carrière à New-York comme dessinateur de publicité. Très vite, ce créateur bouillonnant d'idées décida de déranger, de choquer et de bousculer le conformisme new-yorkais par des projets délirants d'emballages de chaussures, des pochettes de disques, d'illustrations dans des revues d'avant-garde. Il travailla pour « Glamour », « Dance Magazine », le « New York Times » (1955) pour finalement devenir la coqueluche du Tout-New-York, la ville de la démesure et des défis. Un beau matin, « Glamour » désira des dessins de chaussures. Le jour suivant, Warhol proposa une cinquantaine de projets étonnants et son succès fut immédiat car personne n'avait alors son talent pour dessiner des chaussures, dans un style réaliste certes, mais transformées selon ses désirs. Warhol leur procurait des formes folles, ajoutait des éléments ou des rubans, leur donnait des reflets argentés et les munissait de talons aiguilles pour en faire des chefs d'oeuvre de mode.

Autour de Warhol s'activa tout un mouvement de jeunes peintres - Roy Liechtenstein et Tom Wesselman entre autres qui représentaient l'époque post-Be-Bop, celle qui vit la naissance de la télévision et du Rock n'Roll ainsi que la mort de l'art conventionnel. Sorti du moule du monde de la publicité, Warhol n'eut guère de peine à s'imposer comme un chef de file de l'art américain.

La société de consommation ne jurait plus que par le ketchup, le Coca-Cola ou la soupe Campbell dont les symboles publicitaires, ainsi que ceux de toute une série d'emballages de produits de consommation, furent détournés par Warhol lequel comprit avant tout le monde que leurs images avaient un impact extraordinaire sur des millions de consommateurs et que leur utilisation au niveau artistique ouvrirait la porte à de nouveaux concepts. Son succès fut alors assuré et on le surnomma rapidement le « Prince du Pop Art », ce qu'il fut assurément en assumant ce rôle avec un sens aigu des affaires.

Ses projets ont-ils été excellents ou à tout le moins esthétiques ? Pas forcément selon certains critiques. Mais une chose est sûre : ils étaient différents, ils annonçaient un style nouveau et ils permettaient aux produits dont il s'inspirait, et à l'art par ricochet, de se vendre. Une autre étape de sa vie, plus intéressante, fut celle où voisinèrent peinture et graphisme selon des procédés multiples. Connue sous le nom de « Fame and Fortune », cette période fertile permit à Warhol d'atteindre son apogée artistique. Il créa un style particulier, en associant des techniques de reproduction avec le graphisme, le dessin et la peinture et ce, en utilisant des matières simples comme le papier, la toile, les acryliques en sérigraphie. Rares sont toutefois ceux qui savent que ce génial concepteur transforma son atelier en véritable usine où s'activaient des dizaines de personnes et qu'il se contenta avant tout de définir des oeuvres réalisées ensuite en équipe, ce qui lui permit d'en produire des milliers au cours de sa carrière.

L'ensemble de ses portraits (Mao, Marylin Monroe, Liz Taylor, Elvis Presley, Mick Jagger ou Kennedy) furent ainsi créés d'après un négatif agrandi obtenu à partir d'une photo polaroïd. Par la suite, Warhol délira autour d'une sélection de couleurs, de teintes en agrandissant les trames. Il masqua les surfaces à l'aide de ses couleurs préférées comme le «magenta» et le vert «pistache». L'entreprise qu'il créa, la «Factory», exécuta des tirages en sérigraphie qu'il signa en quantité.

Dès les années 80, les oeuvres de Warhol atteignirent des sommes folles et les musées achetèrent alors à tout va grâce à l'appui du galeriste Leo Castelli qui lança tant d'autres grands noms de la peinture américaine d'après-guerre et contribua à faire de New York le centre principal de l'art contemporain dans le monde. Warhol eut également en la CIA un allié de poids qui favorisa son ascension fulgurante puisque dans le cadre de sa lutte contre le Communisme, ce service de renseignement chercha à mettre fin à l'hégémonie européenne en incitant les musées d'outre-Atlantique à acheter en priorité des oeuvres d'artistes américains.

Warhol réalisa des commandes en chaîne et devint riche à millions sans guérir toutefois de sa mesquinerie. Aujourd'hui, ses créations ont été plusieurs fois jusqu'à dépasser les 4 millions de dollars dans des ventes aux enchères. Warhol était aussi un collectionneur quelque peu excentrique qui amassa des meubles rococo, des lampes Tiffany, des tableaux de Rauschenberg, de la verrerie contemporaine, des milliers de chaussures de formes bizarres ainsi qu'un nombre incroyable de gadgets à cinq sous qu'il empila dans sa maison quasiment du sol au plafond.

Mort à la suite d'une opération en 1987, Warhol fut le représentant d'une époque de grandes mutations, tant technologiques que politiques, qui observa le monde avec une certaine froideur sinon avec cynisme. A travers son art, il imprima dans le subconscient des gens une nouvelle interprétation ou vision de l'existence alors que sa vie fut celle d'un voyeur entouré lui-même de gens bizarres, figures de proue de ce qu'on appelait l'Underground new-yorkais et qui firent de lui leur pape. Warhol filma aussi sans vergogne les personnages de ce monde souterrain qui fascina tant le Tout-New York et en fit littéralement des stars. Il contribua ainsi au succès du chanteur Lou Reed, du photographe Robert Mapplethorpe et du peintre Jean-Michel Basquiat.

En 1990 s'est déroulée une rétrospective Andy Warhol au Centre Pompidou laquelle a attiré plus de 300 000 visiteurs. Maintenant, Warhol est devenu un mythe et surtout le roi du Pop Art qui a révolutionné le marché de l'art depuis les années 1980 en devenant pour beaucoup de collectionneurs, surtout de jeunes entrepreneurs, le symbole de leur réussite. Il restera cependant aux historiens de définir plus précisément le rôle de ce créateur qui associa l'art à la publicité ou qui plus prosaïquement fit de la publicité de l'art. A l'évidence, il fut plus un génial concepteur qui créa de l'art "à revendre" qu'un artiste du calibre de Picasso plus intéressé avant tout à faire de l'art pour l'art.

Biographie présentée par Stéphen Moysan.

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